L’Assemblée nationale a adopté ce mercredi la proposition de loi permettant de résilier à tout moment les contrats de complémentaire santé. Le texte doit encore passer devant le Sénat. Son application se fera au plus tard le 1er décembre 2020.
L’Assemblée nationale a voté, mercredi 27 mars, la proposition de loi visant à résilier à tout moment et sans frais son contrat de complémentaire santé au bout d’un an de souscription. Le texte, porté par le député Lrem Dominique Da Silva, doit cependant encore passer au Sénat avant d’être définitivement entériné. Cette proposition de loi est fortement combattue par le mouvement mutualiste qui alerte sur les nombreux effets pervers que pourrait entraîner cette mesure.
Si le Sénat validait ce vote, les contrats de complémentaire santé seraient désormais alignés sur ceux souscrits dans le cadre d’une assurance habitation ou auto. Depuis la loi consommation de 2014, ces derniers peuvent être résiliés à tout moment, une fois passée la première date d’anniversaire du contrat.
Agnès Buzyn, la ministre de la Santé, est venue défendre cette proposition de loi devant l’Assemblée. Elle assure que l’augmentation de la concurrence incitera les complémentaires à diminuer les prix, notamment en réduisant leurs frais de fonctionnement afin d’attirer ou de garder des assurés. Les complémentaires estiment, à l’inverse, que cette réforme fera grimper les frais de gestion, du fait de la charge administrative des dossiers de résiliation et du « nomadisme » des adhérents, et entraînera une hausse des coûts de marketing et de communication, faisant enfler mécaniquement le prix des cotisations.
De son côté, le député Pierre Dharéville (Pcf) estimait, devant l’Hémicycle, que « cette proposition de loi s’inscrit hélas dans une lente entreprise de démolition du mouvement mutualiste dans notre pays ». Elle n’est « que le prétexte à une nouvelle offensive libérale dans le domaine si lorgné de l’assurance-maladie. Cette mesure aux accents vexatoires, puisqu’elle avait déjà été critiquée par les principaux acteurs, va mettre un nouveau coup de masse dans l’édifice de la santé solidaire en affaiblissant encore le mutualisme ». Selon lui, en « traitant une complémentaire santé comme une assurance auto », le législatif ouvre grand l’espace à des puissances financières, sans se soucier de la seule question qui vaille finalement : cela fera-t-il progresser l’accès aux soins ? « Accroître la concurrence dans le domaine de l’assurance complémentaire santé, c’est s’en remettre au marché pour ce qui est d’assurer l’égal accès aux soins. Pas plus que la santé elle-même, le droit à la santé n’est une marchandise. »
Faire progresser l’accès aux soins ? A l’évidence non, car cette loi pourrait complexifier le recours au tiers payant, comme l’ont dénoncé dans une tribune aux Echos un collectif de directeurs de mutuelles.
Les députés Boris Vallaud (PS) et Gilles Lurton (Les Républicains) ont regretté, pour leur part, qu’aucune étude d’impact préalable n’ait été menée. Cette proposition de loi va-t-elle améliorer la politique de prévention conduite par les mutuelles ? La solidarité ? Va-t-elle réduire les inégalités ? s’est interrogé le député PS. « Non », répond-il, en déplorant que, à l’inverse, « banaliser la santé comme un bien de consommation conduise à affaiblir les mutuelles, à jouer le jeu des banques et des assurances ».
[…] « La complémentaire santé n’est pas une assurance auto », estime le député Pierre Dharévill… […]