Martine Mas : « Construire le militantisme de demain »

Martine Mas, administratrice de la Fédération des Mutuelles de France © DR
Martine Mas, administratrice de la Fédération des Mutuelles de France © DR

Suite au Congrès de Brest qui a réuni en octobre dernier ses militants, les Mutuelles de France lancent les conférences numériques thématiques. Ces moments d’échanges, de débats et de réflexion permettront de construire la feuille de route 2021-2023 de la Fédération. Quatre thèmes ont été retenus : « Agir en mouvement social », « Agir contre les discriminations », « Construire le militantisme mutualiste de demain » et « Réinventer les lieux mutualistes : l’exemple des tiers lieux ». Martine Mas, administratrice de la Fédération, présente l’atelier consacré au militantisme mutualiste de demain.

Les Mutuelles de France organisent une conférence sur le thème « construire le militantisme de demain ». Pourquoi ce choix ?

Martine Mas : La Fédération des mutuelles de France est un mouvement vivant ! Donc, le renouvellement est au cœur de nos réflexions et de notre travail.  Réfléchir au militantisme de demain, ce n’est pas l’opposer à celui d’hier  ou d’aujourd’hui. Nous ne sommes pas des machines qu’il faudrait remplacer mais des femmes et des hommes engagés qui voulons peser sur la marche de notre société. Tout ça s’inscrit donc dans une continuité et un chemin sur lequel nous évoluons et qui nous fait évoluer. 

Pour cela, nous devons prendre en compte notre époque, les contraintes nouvelles qu’elle fait peser et les opportunités qu’elle offre. Nous avons conscience des difficultés à renouveler « notre cheville ouvrière » qui est le cœur de notre mouvement dans le contexte actuel. Les contrats collectifs obligatoires, par leur nature, génèrent des adhérents plutôt passifs qui n’entendent pas, ou n’imaginent tout simplement pas, s’investir davantage. Les tensions sur le marché du travail font que de plus en plus considèrent l’engagement comme une entrave à la vie professionnelle alors que cela peut être une chance. Et puis les contraintes liées à la vie familiale peuvent être exacerbées, par exemple pour les parents isolés.

 » la transmission de nos combats et de nos victoires est essentielle « 

Martine Mas, de la Fédération des Mutuelles de France

La fédération a déjà travaillé sur certains de ces sujets. Tout ça pour dire qu’il n’est pas surprenant mais qu’il est très pertinent de se réinterroger sur ce contexte social et humain et de se projeter sur comment construire le militantisme de demain. C’est d’ailleurs vital car sans militant, pas de mouvement !

En quoi est-il plus compliqué aujourd’hui de recruter des militants qu’il y a quelques années ?

C’est sans doute le fait de toutes les époques de dire que « c’était mieux avant » ! Effectivement, actuellement, il y a des obstacles, des contraintes pour recruter de nouveaux militants mutualistes. En opposition, il y a aussi, et dans toutes les générations y compris chez les jeunes,  des actions d’entraide et de solidarité qui se multiplient dans la période actuelle aussi difficile soit-elle.  N’oublions pas que c’est dans l’adversité que sont nées les mutuelles et qu’elles expriment toute leur efficacité. A nous de provoquer la rencontre, de contribuer à la prise de conscience et de faire en sorte que nos structures soient ouvertes sur autrui et accueillent les envies d’engagement. Sur cette base, je crois vraiment que l’on peut arriver à surmonter les difficultés liées à l’époque, comme la centralisation, la concentration des structures ou la complexification des mécanismes de protection sociale. 

Comment pensez-vous vous y prendre pour recruter de nouvelles forces vives ? Qu’est-ce qui pourrait motiver de nouveaux militants à rejoindre notre mouvement ?

Je ne peux pas répondre en détail à cette question vu que c’est justement l’objet de cette conférence numérique thématique d’y réfléchir. Mais nous ne partons pas de rien ! S’ouvrir à de nouvelles pratiques, s’enrichir de l’expérience de nos partenaires, comme la passionnante discussion autour de l’intervention de Sonia Serra, la secrétaire générale de la fédération des Bouches-du-Rhône du Secours populaire, lors de l’étape marseillaise du Tour de France préparatoire au congrès le 13 février 2020. D’autres partenaires peuvent nous inspirer, comme Médecins du Monde, l’UGICT CGT, Aides… De toute façon nous n’allons pas transposer des pratiques d’ailleurs, nous allons nous en inspirer pour adapter les nôtres. Il y a un autre enjeu déterminant pour le militantisme de demain, c’est de mieux nous faire connaître, de renforcer la singularité mutualiste parce que les règles en vigueur nous assimilent trop à des compagnies d’assurance et qu’on ne milite pas pour une compagnie d’assurance ! Enfin, dernier point à mon avis crucial en matière de militantisme : la formation. C’est un puissant outil d’intégration, de sensibilisation politique et de prise de conscience des problèmes du monde. C’est aussi la formation qui unie les générations dans leurs engagements :  la transmission de nos combats et de nos victoires est essentielle. Pour parler de tout cela et inventer nos solutions, nous avons  rendez-vous le 2 mars après-midi pour la 3e conférence numérique thématique !